 
De l'isolement à l'engagement : comment j'ai redécouvert ma citoyenneté
Une lettre à celui que j'étais il y a encore quelques mois
En amont de notre événement du 12 novembre sur la citoyenneté comme remède à l'isolement et le sentiment d'impuissance, je souhaitais partager une réflexion personnelle. Chaque parcours est différent, mais j'ai ressenti le besoin de mettre en mots cette expérience, dans l'espoir qu'elle puisse ouvrir le dialogue et résonner avec le vécu d'autres personnes.
Cher moi d'hier,
Au début de cette année, je me suis réveillé d'une longue période de dormance. Fût une époque mes convictions m'animaient, elles me tiraient en avant. Mais avec le temps, les cacophonies d'un monde assourdissant ont transformé cet élan en paralysie.
Cette lettre, c'est celle que j'aurais voulu recevoir dans mes moments de doute.
Le constat : une génération qui va mal
Je sais que tu es anxieux tout comme les proches qui t'entourent. En vrai, ça ne me surprend pas quand on nous rappelle en permanence l'état fébrile du monde. Guerres, montée de l'extrémisme, crise climatique.
On nous dit que le monde est voué à brûler, alors à quoi bon agir ? J’avoue que face à cette croyance, il est plus simple de se voiler la face et de s'anesthésier à coup de binge watching, doomscrolling et de divertissements éphémères. Et pourtant, malgré notre immobilisme, le monde ne cesse de changer et de se polariser. On a tant d’indignation, mais une peur bleue de l’action.
La cause : l'économie de l'attention
Pas besoin d'aller chercher loin quand on a fait le choix de plus lire l’actualité qu’on estime comme trop anxiogène et qu’on se laisse plutôt porter par les algorithmes. Dans cette économie du clic où notre attention est la monnaie première, les récits alarmistes alimentent les algorithmes. On nous dit qu'on est responsable de tout, de la fonte des glaciers au néocolonialisme. On nous présente des défis si immenses qu'on ne peut que se sentir écrasé.
Les conséquences : le vide que nous laissons
Alors on préfère s'isoler, se désintéresser. "De toute manière, ça sert à quoi si je m'implique ? Il y aura d'autres personnes pour le faire à ma place."
Mais notre désengagement revêt un réel danger. Car oui, il y a d'autres personnes qui vont le faire. Certaines bien intentionnées, d'autres beaucoup moins. Pendant que nous nous morfondons, d'autres prennent les rênes. La montée de l'extrémisme politique, par exemple, est autant le fruit de notre désengagement que de l'engagement déterminé de ses partisans.
Le remède : commencer petit
Et si la solution était juste devant tes yeux ? Tu ne fais que te plaindre de l'état du monde, mais que fais-tu concrètement ? Je sais que tu penses qu'il faut déplacer des montagnes, mais s'il s'agissait déjà de balayer quelques tas de poussière ?
Tu es le premier à voir que ton palier est poussiéreux. Peut-être pourrais-tu commencer par le déblayer ? Ta voisine âgée semble isolée. Peut-être pourrais-tu prendre du temps pour discuter avec elle ?
"Ça sert à quoi ?" me diras-tu. Pris individuellement, pas grand-chose. Mais multiplie ces actions par des milliers, et on commence à voir émerger quelque chose de puissant.
Et peut-être qu'en déblayant ton palier, tes voisins vont suivre. Peut-être que tu vas construire des liens, te connecter à une communauté ? Et avant même que tu t'en rendes compte, tu auras envie de t'impliquer davantage. Tu rejoindras une association, feras du bénévolat. Et te voilà plus épanoui que jamais.
Car la réalité, c'est que le meilleur remède contre le sentiment d'impuissance et d'anxiété, c'est le lien social. C'est l'affranchissement, c'est le sens. En te donnant une mission, aussi petite soit-elle, tu te fais du bien à toi et au monde qui t'entoure. Tu redeviens acteur plutôt que spectateur de ta propre vie.
Par où commencer ? Le pouvoir des petits gestes
"Oui mais par où est-ce que je commence ?" me demandes-tu encore, sceptique.
Commence par sortir de chez toi. Va prendre un café dans la boulangerie du coin au lieu de le préparer machinalement chez toi. Demande à la boulangère comment elle va, vraiment. Complimente un de tes amis sur quelque chose de sincère. Souris à des inconnus dans la rue.
Tu verras, c'est magique. Plus tu le fais, plus tu as envie de le faire ! C'est comme un muscle que tu réentraînes après des mois d'inactivité.
Et puis PAF ! Soudainement, tu as envie de faire du bénévolat. Tu as envie de t'engager comme tu peux. Tu as envie de voter et donc tu t'intéresses à la politique d'un œil plus critique. Tu lis les programmes, tu participes aux débats, tu t'informes auprès de sources diverses.
La citoyenneté comme antidote
Ce que j'ai découvert, c'est que la citoyenneté n'est pas qu'un concept abstrait qu'on étudie à l'école. C'est un antidote puissant contre l'isolement et le désespoir modernes. Quand tu t'engages, même à petite échelle, tu retrouves ton pouvoir d'action. Tu laisses derrière toi le rôle de spectateur pour redevenir pleinement acteur.
La citoyenneté, c'est reconnaître que tu fais partie d'un tout plus grand que toi, que tes actions ont des conséquences, que ta voix compte. C'est reprendre le contrôle sur ton environnement immédiat pour progressivement élargir ton cercle d'influence.
Un message d'espoir pour demain
Alors cher moi d'hier, cher lecteur qui me ressemble peut-être, le monde n'est pas si sombre que les algorithmes voudraient nous le faire croire. Il y a des milliers de personnes comme nous qui se réveillent chaque jour, qui refusent la résignation, qui choisissent l'action plutôt que l'inaction.
L'engagement citoyen n'est pas réservé aux héros ou aux militants de profession. Il commence par un sourire, une conversation, un geste d'entraide. Il grandit avec chaque bulletin glissé dans l'urne, chaque heure de bénévolat, chaque prise de parole pour défendre ses valeurs.
Car au final, nous avons le choix : subir le monde qu'on nous impose ou participer à sa construction. Et ce choix, nous le faisons chaque jour, dans chacun de nos gestes, dans chacune de nos interactions.
C'est pour prolonger ce cheminement et marquer sa relance en Suisse romande qu'Opération Libero vous propose une soirée le mercredi 12 novembre : "Citoyenneté face à l'impuissance et à la solitude". Loin des grands discours, nous y explorerons ensemble comment l'engagement citoyen peut être un remède concret à la solitude et au sentiment d'impuissance. Ce premier pas, ce "petit geste" que l'on cherche parfois, c'est peut-être simplement de nous rejoindre ce soir-là pour commencer la conversation.
Parce qu'au fond, nous ne sommes pas condamnés à l'isolement. Nous ne sommes pas condamnés au désespoir. Nous avons juste égaré notre pouvoir d'agir. Il est temps de nous le rappeler.
Avec espoir et détermination,
Moi d'aujourd'hui
Damian Laird,
Chef d'équipe Suisse Romande
 
Rejoignez-nous le 12 novembre pour continuer cette conversation. Ensemble, réinventons notre citoyenneté.
 
 
 
